Culturecie / Juin 2009

 

Prix Théâtre 13 - « L’Ecole des Bouffons » : Grand Jeu ne suffit pas

  

 

Cet ovni théâtral qui oscille en permanence entre réflexion sur le métier de comédien et délire total retient l’attention grâce à une distribution étonnante. Mais la mise en scène est parfois un peu laborieuse et ne facilite pas toujours la compréhension du propos.

L’esquisse…

En Flandre, au XVIème siècle. Un couvent reconverti en école pour former des bouffons, ces comédiens d’antan peu valorisés, souvent dépréciés et malmenés parce que religieusement peu recommandables. Au cours de leur dernière soirée de formation, le maître Folial rassemble ses élèves pour leur révéler le secret de leur art. Mais les impétrants, usés d’humiliation au cours de leur apprentissage, ourdissent une vengeance : tuer la fille de Folial…

La critique de Franck Bortelle…

Troisième spectacle concourant pour le prix du Théâtre 13, « L’Ecole des bouffons » détonne avec les deux précédents par sa vitalité, son énergie, son athlétisme. Du propos de Michel de Ghelderode, auteur flamand un peu tombé en désuétude, les deux metteurs en scène ont extrait ce qu’ils considèrent probablement à juste titre comme une évocation du monde d’aujourd’hui sous couvert d’une action qui se déroule pourtant il y a quatre cents ans. Une atemporalité qui leur permet d’accentuer encore le trait, notamment avec des accessoires vestimentaires plus contemporains encore que ceux de l’époque de l’auteur (mort en 1962).

Car finalement, cette école des bouffons ne serait-elle pas tout simplement un cours d’art dramatique d’aujourd’hui, comme il y en a pléthore, l’un de ces lieux de souffrance et de labeur acharné pour peu d’élus et beaucoup de candidats ? Avec en corollaire une question atemporelle encore : jusqu’où on peut se prévaloir du droit, et du devoir, de transmettre un savoir-faire issu de cette science exacte… dont personne ne connaît les règles, comme Jules Renard se plaisait à le rappeler en définissant la dramaturgie ?

A ces questions un peu intellectualistes, cette troupe de joyeux drilles répond par une quasi permanente loufoquerie. A l’exception de quelques propos iconoclastes (crédo de Ghelderode), l’ensemble est une débauche d’effets visant avant tout à surenchérir dans la farce. L’idée est bonne, le résultat un peu moins. Car si l’attention est retenue grâce à d’excellents comédiens (mention spéciale à Marc Lamigeon qui déploie un jeu qui frise le génie), la scénographie, elle, apparaît quelque peu outrancière. Là encore, un peu plus de clarté n’aurait pas été superflue.