Une programmation, ce n’est pas l’effet du hasard, ce n’est pas mettre tel spectacle dans la grande salle et tel autre dans la petite. Non, ce n’est pas un hasard, mais une nécessité.
Bien sûr, il y avait cette unité avec le Shake Nice en janvier et février. Et la semaine dernière correspondait avec cet impératif catégorique, avec le Grèce Antique : Irina brook
mariait, pour notre plus grand bonheur, un texte contemporain de Simon Abkarian, Rébetiko Ménélas Rapsodie, et l’antique tragédie des enfants d’Atrée. Occupons-nous d’abord de cette
dernière.
Sont convoqués à la barre : Eschyle, Sophocle et Euripide. On vous avez prévenu, c’est du lourd. Au gouvernail, le metteur en scène Cyril Cotinaut. L’équipage est assuré par les comédiens du
Tac-Théâtre.
Agamemnon
Non ? Vous ne voulez tout de même pas que je vous raconte l’histoire ? Bon. Je vous la fais courte. Dans la mythologie grecque, Atrée est roi de Mycènes (ou d’Argos). Il est le père
d’Agamemnon et de Ménélas, et le fondateur de la lignée des Atrides. Il est le frère de Thieste. Et là, ça s’gâte. Hé, je ne vais tout de même pas vous raconter la suite, non ?
Depuis 2009, Cyril Cotinaut est professeur de la Classe d’Art Dramatique du Conservatoire de Nice. Depuis 2010, il est intervenant artistique pour le Théâtre National de
Nice et au sein de la Licence Arts du Spectacle / Université de Nice.
En 2011, il met en scène Electre, de Sophocle. Deux saisons plus tard, c’est Oreste, d’Euripide. Sa nouvelle création, cette saison, c’est Agamemnon, d’Eschyle. Et pour
donc sa création au TNN, Irina Brook lui demande qu’outre cette pièce, il puisse présenter la « totale ». Ce qui fût fait samedi 14.
Ah ce bonheur ! 5 heures de théâtre ! On se serait cru en Avignon.TAC signifie Théâtre de l’Acteur en Création. C’est donc l’Acteur qui
est au centre des Créations de Cyril Cotinaut. Et donc le texte. Ici, point de colonnes, d’afféteries de décors, de toges antiques. Le corps des acteurs, leur voix, le texte. Ici, tout est
créativité.
Electre
Les acteurs ont des vêtements de signifiance contemporaine, avec juste une désinence précisant le personnage. Les éléments de scénographie sont réduits à leu plus simple expression mais prennent
vie – et sens – selon l’imaginaire de chaque spectateur. Un rideau brisé peut se voir comme une voile de navire, un volume sur lequel on dépose une offrande et l’on vient prier, et c’est le
tombeau d’Agamemnon. L’antenne d’un poste de radio est signifiée comme une parole oraculaire. Qu’avons-nous besoin de plus ?
La force de conviction de ces jeunes acteurs et telle qu’ils prennent cette parole vieille de vingt cinq siècles et nous la tangibilsent (pourquoi n’inventerai-je pas le verbe
« tangibiliser » ?). Cette parole pure devient pour nous sens et réalité. Quand ils nous parlent des dieux, ils ne nous font pas voir des choses abstraites, mais une concrétude.
Nous sommes éperdument – et à chaque seconde – dans le sens tragique de la vie, dans le fatum. Et 25 siècles plus tard, les familles se déchirent toujours, les hommes font toujours la guerre aux
hommes, et les dieux ont soif.
Oreste
Citer ces acteurs est une ardente obligation : Julien Aubrun, Aymeric Chapuis, Marie-Laure Communal, Cyril Cautinaut, Catherine Haregraeves, Nolwen Le Doth, Yann Lheureux, Julie Palmier,
Pierre-Benoist Varoclier Cyrille Voguet, et la participation de Séréna Allassia. Une mention aussi aux lumières d’Emmanuel Pestre. A souligner aussi un travail de dentelle sur la composition de
la bande son.
Si vous avez raté cela, vous avez une séance de rattrapage le samedi 11 avril au Forum Jacques Prévert de Carros, pas loin de Nice info@forumcarros.com
Comme tous les ans le Théâtre s’installe au Fort Antoine à Monaco pour le plus grand plaisir des amateurs dont je suis.
“Fort Antoine dans la ville” ce sont des spectacles de grande qualité offert par la Principauté et qui cherche à développer un théâtre vivant et éclectique, tout en étant à l’écoute de
la création contemporaine. Il se veut un lieu de rencontre, de convivialité et de complicité avec le public.
Ce soir la troupe du Tac Théâtre a proposé une tragédie antique vieille de 2500 ans : « Electre » de Sophocle. mis en scène par Cyril Cotinaut qui insiste sur la modernité de la pièce sur des
sujets intemporels tels que la vengeance, le rapport aux dieux ou le refus de la mort.
Une mise en scène résolument contemporaine très inventive. Des comédiens époustouflants surtout Cyrielle Voguet en Electre magistrale.
Une belle façon de faire (re)découvrir les classiques aux plus jeunes.
Les comédiens déambulent sur la scène improvisée du fort Antoine avant le spectacle. Ceux qui sont venus pour voir des toges peuvent repartir : ce sera costumes actuels. Quelques
seaux, quelques poubelles quelques pelles et balayettes, un transistor, jonchent le sol. Ceux qui sont venus pour les décors, le palais de Mycènes reconstitué, peuvent partir
également.
Un transistor mal ajusté crache une mélodie qui évoque la Marseillaise. Instinctivement, dans ma tête, je chante « contre nous de la tyrannie, l’étendard sanglant est
levé » et « Qu’un sang impur, abreuve nos sillons ». Pas de doute, Electre résonne toujours dans l’époque contemporaine. Clairement, Electre nous parlera à nous, contemporains de la
comédienne, de nos problèmes de contemporains, qui semblent être les mêmes que ceux d’il y a deux mille cinq cent ans.
Six comédiens, quatre femmes deux hommes, pour sept rôles et le chœur des Mycéniennes dans le texte de Sophocle. Pylade et Egisthe s’effacent et une comédienne se mêlant au public
représente le chœur.
Le texte est actualisé, le texte original de Sophocle est ainsi ponctué de références et dialogues nettement plus actuels qui ne font pas toujours dans la finesse. La chanson de
Sabine Paturel, les Bêtise, interprétée par Chrysothémis pour parodier l’infernale Electre était-elle bien nécessaire là où un jeu de grimaces et une bonne
gestuelle aurait pu faire l’affaire ? Le monologue au micro du précepteur joué par Julien Aubrun (difficilement audible par ailleurs) rythmé par la musique des danses polovtsiennes
duPrince Igor de Borodine passe nettement mieux.
Les Érinyes sont sonores, leur cri est une longue lamentation, elles entourent le spectateur, deviennent récurrentes, ne lâchent pas prises. Les comédiens se lancent dans l’arène.
Electre (Cyrielle Voguet) extériorise sa douleur s’asperge d’eau, de cendres, de terre rappelant la phrase du Président dans l’Electre de Giraudoux : « Cette enfant
elle-même voit le défaut de votre argument. Sur nos fautes, nos manques, nos crimes, sur la vérité, s’amasse journellement une triple couche de terre, qui étouffe leur pire virulence
: l’oubli, la mort, et la justice des hommes ».
Electre n’y croit plus. Croire. Soi, l’autre, la justice, le destin, les dieux, croire en quoi, croire en qui ? La mise en scène fait un détour par l’imagerie chrétienne avec la
figure du Christ et une mater dolorosa comme pour mieux enfoncer le clou : les questions d’Electre sont toujours d’actualité.
Nice Matin - 29.01.2013
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La Semaine des Spectacles - Alpes Maritimes - Janvier 2013
Le Crabe des Arts - Critique de spectacle - Février 2012
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Le Patriote - 10 février 2012
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Vosges Matin - 23.08.11
Vosges Matin - 19.08.11
Février 2011 - Crabe des arts - journal étudiant (Nice)